CCAP travaux : définition, contenu et conseils pour réussir la rédaction
Dans tout marché public de travaux, chaque pièce contractuelle joue un rôle déterminant dans la bonne exécution des prestations. Parmi ces documents, un seul tient souvent lieu de véritable colonne vertébrale administrative du contrat : le CCAP travaux (Cahier des Clauses Administratives Particulières).

Ce document contractuel, élaboré dans le respect du Code de la commande publique et intégré au dossier de consultation des entreprises (DCE), fixe les clauses administratives propres à chaque marché. Il précise les modalités d’exécution des travaux, les conditions financières, les obligations du titulaire, les délais d’exécution, les pénalités en cas de retard d’exécution, ainsi que les procédures de réception des ouvrages. Sa bonne rédaction conditionne la sécurité juridique du marché et la maîtrise de son déroulement, du piquetage général jusqu’à l’achèvement des travaux.
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Qu’est-ce que le CCAP travaux ?
Le CCAP travaux est un cahier des clauses administratives particulières qui précise, pour un marché donné, l’ensemble des règles spécifiques applicables à l’exécution des prestations.
Contrairement au CCAG, qui établit un ensemble de règles générales applicables à une catégorie de marchés (travaux, fournitures, services…), le CCAP adapte ces règles au contexte opérationnel du projet. Il établit les conditions financières, fixe les procédures d’ordre de service, définit la période de préparation, encadre la mise en œuvre des travaux et détermine les modalités de réception et de garantie.
En cas de stipulation différente entre le CCAG et le CCAP, c’est ce dernier qui prévaut. Cela signifie que le CCAP prend le pas sur les clauses générales et devient le texte de référence en cas de contradiction.
Le rôle stratégique du CCAP dans les marchés publics de travaux

Le cahier des clauses administratives particulières n’est pas un simple complément documentaire : il constitue un outil juridique et opérationnel essentiel à la bonne exécution du marché. Son rôle s’articule autour de plusieurs fonctions majeures :
Sécuriser le cadre contractuel
En définissant précisément les obligations du titulaire, les conditions de paiement, les délais d’exécution, les modalités de contrôle et de réception, le CCAP travaux garantit la sécurité juridique de l’exécution du marché. Il contribue à prévenir les litiges liés à l’interprétation des clauses contractuelles.
Adapter les clauses générales aux spécificités du projet
Chaque marché public présente des contraintes particulières : nature d’ouvrage, complexité technique, calendrier, conditions financières. Le CCAP permet de traduire ces spécificités dans des dispositions contractuelles sur mesure, en conformité avec les règles légales.
Assurer l’équilibre entre les parties
Le CCAP protège à la fois le pouvoir adjudicateur (collectivité, État, établissement public) et le titulaire (entreprise attributaire). Il fixe notamment les conditions de mise en demeure, les sanctions en cas de manquement, les possibilités de résiliation, ainsi que les modalités de règlement.
Organiser l’exécution opérationnelle du chantier
Du piquetage spécial à la pose des matériaux produits ou composants, le CCAP encadre toutes les étapes de la réalisation. Il peut préciser les exigences en matière de protection de la santé, de sécurité, ou encore de gestion environnementale sur le chantier.
Le CCAP dans le dossier de consultation : une pièce contractuelle obligatoire
Dans un marché public, le CCAP fait partie intégrante des documents contractuels qui composent le dossier de consultation des entreprises (DCE). Il est établi par le maître d’ouvrage ou la personne responsable du marché, souvent avec l’appui du maître d’œuvre et d’un juriste spécialisé en marchés publics.
Le CCAP est obligatoire notamment dans les cas suivants :
- Lorsque le montant contractuel du marché dépasse les seuils européens de mise en concurrence fixés par l’Union européenne.
- Lorsque des dispositions spécifiques doivent être introduites dans le cahier des charges (délais d’exécution, clauses financières, conditions de réception, pénalités).
- Lorsqu’une stipulation différente du CCAG doit être prévue pour tenir compte de la nature du projet.
Cadre juridique et hiérarchie des documents contractuels dans un marché public de travaux
Le fondement juridique du CCAP travaux
Sa rédaction, sa structure et ses effets sont définis principalement par :
- Le Code de la commande publique, qui constitue la base juridique applicable à tous les marchés publics de travaux.
- Les arrêtés publiés au Journal officiel, notamment ceux du 30 mars 2021, qui ont approuvé les nouveaux CCAG travaux (Cahiers des Clauses Administratives Générales).
- Les guides et circulaires publiés par la Direction des Affaires Juridiques (DAJ) du ministère de l’Économie, qui fournissent des recommandations d’application.
Le CCAP doit être rédigé conformément aux principes généraux de la commande publique : liberté d’accès à la commande, égalité de traitement des candidats, transparence des procédures, proportionnalité des exigences. Il doit également respecter les règles issues du droit européen, notamment les directives de l’Union européenne relatives à la mise en concurrence et à la passation des marchés.
Dans ce cadre, le pouvoir adjudicateur doit veiller à ce que le CCAP :
- Ne contienne aucune clause discriminatoire ou illégale.
- Soit cohérent avec le CCAG travaux applicable.
- S’articule correctement avec les autres documents contractuels.
- Soit rédigé dans un langage clair et précis, conforme aux usages juridiques et techniques du secteur.
La hiérarchie des documents contractuels
En cas de contradiction entre les documents, l’ordre de priorité prévu à l’article 4 du CCAG 2021 s’applique. Cet ordre permet de déterminer quelle clause prévaut juridiquement.
- Acte d’engagement : il formalise l’acceptation de l’offre par le pouvoir adjudicateur et lie les parties sur les éléments essentiels du contrat.
- CCAP.
- CCAG : il contient les dispositions générales applicables aux marchés publics de travaux.
- CCTP et plans : ils détaillent les spécifications techniques, les exigences de qualité, les matériaux produits ou composants à utiliser, et les méthodes de mise en œuvre.
- Autres annexes et documents complémentaires : calendriers détaillés, mémoires techniques, annexes financières, documents BIM, etc.
Cette hiérarchie garantit la cohérence de l’ensemble contractuel. Ainsi, si une clause du CCTP contredit une disposition du CCAP, c’est ce dernier qui prévaut. Et si une clause du CCAP est en contradiction avec l’acte d’engagement, c’est ce dernier qui prime.
CCAP, CCAG et CCTP : des documents complémentaires mais distincts

Différences principales entre CCAP et CCAG :
- Le CCAG fixe des règles de portée générale, valables pour tous les marchés de même nature.
- Le CCAP adapte ces règles aux caractéristiques concrètes du projet et prévaut sur le CCAG en cas de divergence.
Différences principales entre CCAP et CCTP :
- Le CCAP traite des aspects juridiques, financiers et administratifs du marché (prix forfaitaires, révision des prix, délais d’exécution, pénalités, modalités de réception, etc.).
- Le CCTP encadre les aspects techniques : nature des ouvrages, méthodes de mise en œuvre, normes de qualité, matériaux et produits, contraintes environnementales ou de sécurité.
L’articulation correcte entre ces documents permet d'éviter toute interprétation contradictoire, litige ou incertitude sur l’exécution des prestations.
L’importance de la cohérence documentaire
Un marché public de travaux repose sur un ensemble de documents contractuels étroitement liés. La moindre incohérence entre eux peut entraîner des litiges, une remise en cause du calendrier, voire une mise en demeure ou une résiliation pour faute.
C’est pourquoi le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre doivent porter une attention particulière à la cohérence entre :
- Le cahier des charges technique et administratif.
- Le CCAP travaux et le CCAG applicable.
- Les dispositions relatives à l’ordre de service, à la période de préparation, aux délais d’exécution, à la retenue de garantie et à la réception des travaux.
Contenu détaillé d’un CCAP travaux
Les éléments d’un CCAP travaux
- Objet du marché : définition précise de la nature et de l’étendue des prestations.
- Durée et délais d’exécution : calendrier, période de préparation, ordre de service, prolongations éventuelles.
- Conditions financières : prix forfaitaires, prix unitaires, modalités de paiement, révision des prix.
- Exécution des travaux : obligations du titulaire, moyens à mettre en œuvre, normes techniques et réglementaires.
- Réception des travaux : procédures, procès-verbaux, point de départ du délai de garantie.
- Pénalités et sanctions : en cas de retard d’exécution, de défaut ou de manquement.
- Résiliation, cession et nantissement : dispositions en cas d’inexécution ou de changement de titulaire.
- Règlement des litiges : arbitrage, recours devant les juridictions administratives compétentes.
Clauses relatives aux délais d’exécution des travaux
Le CCAP travaux joue un rôle dans la gestion du calendrier d’exécution. Il fixe la durée totale du marché, les différentes phases d’intervention et les conditions dans lesquelles elles doivent être réalisées.
Période de préparation et ordre de service
Avant le démarrage effectif du chantier, une période de préparation permet à l’entreprise de mobiliser les moyens humains, techniques et logistiques nécessaires.
Le point de départ des travaux est formalisé par un ordre de service notifié par le pouvoir adjudicateur.
Délais contractuels et prolongations
Les délais d’exécution définis dans le cahier des charges commencent à compter à partir de la date de notification de l’ordre de service. Ils peuvent être exprimés en jours, semaines ou mois.
Des prolongations sont possibles dans certains cas : force majeure, conditions climatiques exceptionnelles, modifications importantes du projet ou retards imputables au maître d’ouvrage.
Retard d’exécution et mise en demeure
En cas de dépassement des délais, le pouvoir adjudicateur peut adresser une mise en demeure au titulaire. Celle-ci fixe un nouveau délai pour l’achèvement des travaux et précise les conséquences en cas de non-respect.
Si le retard persiste, des pénalités contractuelles sont appliquées conformément aux clauses prévues dans le CCAP.
Clauses financières et modalités de paiement
La partie financière du CCAP précise la nature des prix, les conditions de rémunération de l’entreprise et les modalités de règlement.
Typologie des prix
Prix forfaitaires : couvrent la totalité des prestations prévues au contrat.
Prix unitaires : calculés en fonction des quantités réellement exécutées.
Prix forfaitaire global : adapté aux marchés à objet unique et défini.
Une clause de révision des prix peut être intégrée pour ajuster la rémunération en fonction de l’évolution des coûts (matériaux, main-d’œuvre…).
Modalités de paiement
- Acomptes versés en cours de marché.
- Projet de décompte mensuel.
- Décompte général.
- Décompte final tenant lieu de règlement définitif.
Conformément à l’article R2192-10 du Code de la commande publique, le paiement doit intervenir dans un délai de 30 jours à compter de la réception du projet de décompte. Passés ce délai, des intérêts moratoires et frais de recouvrement sont dus.
Avances, retenues et garanties
Des avances versées dès la notification du marché.
Une retenue de garantie (en général 5 %) pour couvrir d’éventuels désordres pendant le délai de garantie.
Des dispositions relatives au nantissement des créances ou à leur cession.
Obligations du titulaire et exécution des travaux
L’entreprise est tenue d’exécuter les prestations conformément aux stipulations du CCAP et aux autres documents contractuels. Ses principales obligations sont :
- Respecter le cahier des charges, le CCTP et le plan général d’exécution.
- Utiliser des matériaux produits ou composants conformes aux normes.
- Mettre en œuvre les mesures de protection de la santé, de sécurité et de gestion environnementale.
- Effectuer le piquetage général (et spécial si nécessaire) pour matérialiser les ouvrages.
- Coordonner ses interventions avec les autres entreprises dans le cadre d’un accord-cadre ou d’un marché allotis.
Réception des travaux et garanties
La réception marque la fin des obligations principales du titulaire et le transfert des risques au maître d’ouvrage.
Procédure de réception
Opérations préalables : vérification de la conformité, essais et contrôles techniques.
Procès-verbal de réception : signé par les parties, il constate l’achèvement des travaux.
Point de départ du délai de garantie : fixé à la date de réception.
En cas de non-conformité, le maître d’ouvrage peut refuser la réception et exiger des corrections. Une mise en demeure peut être adressée à l’entreprise.
Délai de garantie
Ce délai, généralement d’un an, impose à l’entrepreneur de remédier aux désordres constatés sans frais pour le maître d’ouvrage.
Pénalités et sanctions contractuelles
Le CCAP prévoit un régime de pénalités destiné à sanctionner les retards ou manquements.
Calcul des pénalités
La formule courante est :
Pénalité journalière = (Montant du marché HT x Taux prévu au CCAP) / 1000
Par exemple, pour un marché d’un montant total de 300 000 € HT avec un taux de 1/1000, la pénalité sera de 300 € par jour de retard.
Plafonds et exceptions
Le CCAP peut prévoir :
Un plafond global de pénalités.
Des taux différenciés selon les lots.
Des exonérations en cas de force majeure ou de retard imputable au maître d’ouvrage.
Bonnes pratiques pour rédiger un CCAP travaux
- Définir précisément l’objet et les besoins pour éviter les interprétations.
- Assurer la cohérence avec le CCAG, le CCTP et les autres documents contractuels.
- Actualiser régulièrement le modèle de CCAP selon les évolutions légales et réglementaires.
- Faire valider le document par le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre et un juriste spécialisé avant publication.
En résumé, le CCAP travaux constitue la colonne vertébrale juridique et opérationnelle d’un marché public. Sa qualité de rédaction conditionne directement la réussite du projet, la maîtrise des délais, la gestion financière et la prévention des litiges.
Le CCAP fixe le cadre juridique et contractuel de la remise du DOE, en définissant ses délais, ses conditions financières, etc. Le DOE, quant à lui, concrétise la fin du marché et permet au maître d’ouvrage d’exploiter et d’entretenir l’ouvrage dans de bonnes conditions. Sans DOE conforme, l’exécution du marché n’est pas considérée comme achevée.
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